• Les faits

Début décembre 2022, nous avons remarqué sur la Banche l’affichage de l’interdiction de pêche à pied des coquillages, faisant suite à un prélèvement du 24 novembre.

Ce qui nous a impressionnés, c’était le niveau élevé du pic de contamination bactériologique, à 7900 E.Coli/100g CLI (*). Cependant le contrôle effectué le 28 novembre, à 490 E.Coli, a permis de lever l’alerte quelques jours plus tard, pour cette fois.

Pour mémoire, pour un site classé en A (bonne qualité), ce seuil d’alerte est de 230 E.Coli, et pour un site classé en B (moyenne qualité), il est de 4600 E.coli.

Ainsi le site de la Banche a été déclassé de A en B en décembre 2020, suite aux alertes récurrentes durant l’année 2020.

Alertés par cet incident majeur, nous avons pris contact avec le labo d’Ifremer, œuvrant pour le réseau REMI de surveillance bactériologique des zones conchylicoles, pour l’ensemble du département des Côtes d’Armor.

Selon la réponse d’Ifremer, cet incident est un nouvel épisode dans une dégradation durable de la pollution du site de la Banche, qu’il observe et signale, depuis l’été 2019, avec une dégradation nette depuis l’été 2020.

Leur rapport de synthèse 2022, qui nous a été communiqué, est explicite : (extrait page 92 du rapport 2022) :

Pour le groupe II, suivi par le point « La Banche-Binic », les résultats sont en forte

dégradation depuis l’été 2020. Jusqu’alors, la qualité sanitaire de cette zone constituait un

cas d’école. Depuis 2012 où des pics de contamination de mauvaise à très mauvaise qualité

étaient observés, des travaux sur la station d’épuration de Binic ont eu lieu et la qualité

sanitaire n’a cessé de s’améliorer, passant année après année d’une classe à l’autre pour

atteindre en 2017 la bonne qualité sanitaire. Cependant, le bruit de fond de la contamination

ne s’est pas stabilisé et plusieurs alertes de niveau 1 ont été déclarées depuis juillet 2019.

Les résultats semblent s’être quelque peu améliorés en 2021, à suivre.

… à suivre, oui, sauf que 2022 a confirmé la mauvaise tendance !

  • Quelques précisions techniques :

Cette alerte sanitaire résulte du contrôle réglementaire effectué régulièrement (tous les mois lorsqu’il n’y a pas d’alerte), par IFREMER, à l’usage de l’ARS et des collectivités : charge à celles-ci de gérer les alertes pour protéger le public mais aussi en principe rechercher l’origine des alertes… et y remédier ?

En ce qui concerne la Banche, les coques dans le sable sont nos indicateurs biologiques : elles filtrent l’eau de mer pour se nourrir, accumulant les nutriments, mais aussi un certain nombre de bactéries, de virus et de molécules chimiques, selon la qualité de l’eau. Ici, ce sont les Escheria Coli (ou E.Coli) et Entérocoques fécaux, que le laboratoire va pouvoir dénombrer.

Le prélèvement des coques est effectué en un point précis : en l’occurrence, pour la Banche, à environ 100 mètres au droit de la cale du pôle nautique.

(*) Ces contrôles sont normalisés : ils sont effectués en analysant un échantillon de 100g de CLI =  Chair + Liquide Intervalvaire des coques prélevées. Le CLI est broyé pour analyser leur niveau de contamination. De là, selon les seuils règlementaires et si la consommation des coquillages est considérée comme dangereuse pour la santé, la pêche à pied est interdite. En cas de récurrence des alertes, la plage est déclassée.

  • Nos réflexions et hypothèses

Nous avons échangé avec Ifremer pour essayer de comprendre d’où provient cette pollution.

La problématique est complexe. Plusieurs hypothèses ont été discutées :

  • Mauvais raccordement d’eaux usées d’origine humaine, ou bien contamination d’origine animale (élevages intensifs)? pour le savoir, la différentiation des bactéries pathogènes est techniquement possible. La difficulté provient du coût d’analyses qu’il faut faire en nombre : en multiples lieux et dans la durée.
  • En plus de la rivière de l’Ic, 2 autres ruisseaux se jetant également dans la baie de Binic sont potentiellement vecteurs de contamination : le Gué Hesnard (qui se jette à l’extrémité sud de l’esplanade de la Banche) et le Vau Madec (en face du port, de l’autre côté de la baie). Le Gué Hésnard draine une partie du plateau de Pordic où ont « poussé » ces dernières années de nombreux lotissements. Ces surfaces artificialisées accélèrent le ruissellement en cas de forte pluie, comme l’ont montré les inondations des boulevards Leclerc et Clémenceau début 2018 et fin 2020… Sont augmentés également les risques de surverse ou de branchements défectueux dans les réseaux d’eaux usées. En tout cas, selon des analyses des eaux de baignade effectuées durant l’été 2020, que nous avait communiquées la Mairie, la piste d’eaux usées d’origine humaine amenées par le Gué Hesnard était en 2020 la plus suspectée.
  • Dysfonctionnement de la station d’épuration ? selon le SATES, en charge de la gestion des stations d’épuration pour le département, que nous avons interrogé, elle fonctionne parfaitement. Néanmoins il nous faut attendre pour le mois de mars prochain la divulgation de la synthèse annuelle du SATES, qui nous donnera les résultats des rejets dans l’Ic pour 2022.
  • Incidence des gros travaux du printemps 2020 sur la Banche? rappelons que suite aux incidents de surverses des eaux usées, des cuves de stockage-tampon ont été installées sous le parking de la Banche, en amont du poste de refoulement situé à côté de la passerelle du bassin. La concomitance entre la mise en service de cet équipement et la « forte dégradation » des résultats pour la Banche nous interroge.

Face à ces questions, notre association veut y voir plus clair. Nous avons effectué en décembre des analyses bactériologiques, mais en analysant directement l’eau et non pas les coques : Voir l’article dans ce même bulletin « Quel est le taux des nitrates dans l’eau de la rivière l’IC ».

En effet, même si, avec une cinétique et des normes différentes, le contrôle des eaux de nos cours d’eau et de nos plages n’obéit pas à la même méthodologie, il y a évidemment un lien entre la qualité du gisement conchylicole et celle des eaux de baignade : la mesure des E.Coli dans l’eau donne la pollution instantanée, quand celle dans les coques donne la pollution cumulée.

La valeur maximale mesurée en décembre dernier est de 360 E. Coli/100ml, valeur obtenue dans l’Ic, en aval de la station d’épuration. Ce résultat est jugé « pas mauvais » par Ifremer mais trop ponctuel pour être signifiant. Selon eux, pour chercher les causes de ces contaminations « il faut plutôt voir les changements sur le bassin versant (travaux sur l’assainissement, mauvais raccordement, changement de pratique…) depuis l’été 2019 ».

  • Conclusion :

Cette alerte nous parait grave en ce qu’elle montre que la plage de la Banche, déjà cruellement touchée par les algues vertes, se dégrade aussi du point de vue de la pollution bactériologique.

D’ailleurs cette pollution chronique des coquillages que nous subissons depuis 2 ans peut être mise en relation avec les drapeaux rouges que nous avons trop souvent vu flotter sur la plage de la Banche durant ces dernières saisons estivales, ne traduisant pas un état de la mer agité et dangereux, mais une alerte sanitaire sur la qualité des eaux de baignade.

La plage de la Banche ainsi que sa piscine et sa pataugeoire en eau de mer constituent un site magnifique. Avec le port, c’est la vitrine touristique de Binic. La baignade et la pêche à pied y sont 2 activités de loisir appréciées universellement et de tout temps.

Il nous semble primordial de tout mettre en œuvre pour restaurer la qualité de l’eau de ce site. Ceci constituera la meilleure publicité pour Binic.

Pour cela, de la même façon que pour les nitrates responsables des algues vertes, nous devons rechercher la ou les sources de cette pollution bactériologique, apportées par nos ruisseaux ou notre rivière contaminés en amont.

A ce stade, nous avons des observations, des hypothèses, mais pas d’explication.

 Quelles sont les organismes en charge d’organiser les investigations sur l’origine (ou les origines) de la pollution bactériologique ? Quels sont leurs plans d’action ?                                                                              

Notre association ne compte pas en rester là : nous continuons à alerter, questionner les experts, interpeller les autorités, investiguer : à suivre, donc…

Pour plus d’information sur l’épisode, voir pollution E coli coques -plage de la Banche à Binic nov-22-V3-13février 2023, ci dessous

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